"Old Dogs and New Tricks" (On n'apprend pas de nouveaux tours à un vieux chien)

Karen Taylor, Directrice de l’éducation et de l’Institut, Ecole Internationale de Genève

Comme beaucoup de vieux adages, l’expression anglaise “Old dogs and new tricks” (On n'apprend pas de nouveaux tours à un vieux chien) n'est pas parole d’évangile, si l'on peut dire. Les proverbes suscitent souvent des interrogations plus qu’ils ne confirment des croyances et, soit dit en passant, il est possible de dresser de vieux chiens. Cette phrase m'est cependant venue à l'esprit lorsque j'ai décidé d'utiliser ChatGPT pour analyser les résultats d'une enquête envoyée à 173 enseignantes et enseignants du primaire à l'Ecolint. Voici mes réflexions sur cette expérience.

Certes, ChatGPT est un outil puissant. L'enquête avait pour sujet les pratiques de l’enseignement collaboratif et contenait sept sections avec 22 questions. Les participants pouvaient y répondre en choisissant 1) Jamais, 2) Parfois, 3) Fréquemment et 4) Toujours ou presque toujours. Il y avait en outre six possibilités de partager des réflexions en texte libre. Il m'aurait fallu de nombreuses heures pour analyser les données de cette enquête si j'avais utilisé le papier et le crayon ou même une feuille de calcul Excel pour étudier les réponses une par une, comme je devais le faire dans le passé.

Ces dernières semaines, j'ai donc beaucoup appris sur la formulation des requêtes pour les outils d’intelligence artificielle. Pour éviter les écueils, celles-ci doivent être pertinentes, précises et cohérentes. Au fil des trois ou quatre analyses générées à ma demande par ChatGPT, j'ai progressé dans ma compréhension de la meilleure manière d'exploiter le potentiel des IA pour traiter l'information. Le problème de l'erreur humaine m'a également été rappelé. Il y avait beaucoup de données à transférer, par petits bouts, de ma feuille de calcul à Chat GPT. Si je n'utilisais pas exactement la même formulation de requête à chaque fois, les résultats différaient. Si je n'étais pas aussi précise que possible, l'analyse n'était pas exacte. J'ai également beaucoup appris sur nous, les personnes impliquées dans la création des questions de l’enquête et dans les réponses. La plupart de ce que j’ai appris est liée au langage.

Nous souhaitons continuer à utiliser cet outil chaque année afin de recueillir des données longitudinales. Lorsque j'ai présenté pour la première fois le contenu et la structure de l'enquête à l'équipe de recherche, nous avons essayé d'anticiper ensemble les éventuelles questions sur le sens de l'enquête. Même si nous y avions réfléchi à l'avance, l'enquête a révélé un certain nombre d'éléments intéressants sur les points suivants:

  1. les rôles et responsabilités (tout le monde ne s'identifie pas comme le suggère l’organigramme de l’école)
  2. le vocabulaire (même si nous avons expliqué que le vocabulaire utilisé dans l'enquête n'était pas spécifique à l'école, les questions et la terminologie étaient fortement contextualisées pour les personnes interrogées)
  3. la nature même de la pratique collaborative.
     

J'ai fini par en retirer plus de questions que de réponses, et c'est l'un des aspects fascinants de la recherche. Une étude peut vous mener dans des directions inattendues ou nécessiter une modification de la question de recherche, et ce à juste titre. Après tout, c'est ce que nous aidons nos élèves à comprendre.

Je vais continuer à me perfectionner dans l'utilisation de Chat GPT pour l'analyse des données, en gardant à l'esprit que ce qui émerge peut être remis en question. Nos capacités de discernement et de réflexion critique restent essentielles, et je sais que nos élèves apprennent la même chose grâce à leurs enseignants. Il s’agit donc bien plus que de “nouveaux tours”, et pas seulement pour de “vieux chiens”.